Le Prince et le Pauvre

Dimanche 7 décembre 7 07 /12 /Déc 18:01
Le Prince et le Pauvre
Kalsang



Thomas est un jeune adulte plutôt aigri et misanthrope qui n’a jamais rien réussi dans la vie, mais il lui reste sa passion pour la musique. William est un adolescent naïf et optimiste qui ne connaît pas le monde "réel" et a toujours eu tout ce qu’il désirait, sauf le droit de participer aux courses moto.
A priori, ils n'auraient jamais dû se rencontrer et encore moins se rapprocher, mais c'était sans compter sur le caractère passionné et entêté de William...



Genres : Romance, drame, humour, mystère, paranormal (ça devrait suffire...)
Rating : MA (18 +), parce que de toute façon on est sur un blog interdit aux mineurs (et, toi, là-bas, tu crois que je t'ai pas vue ? Je sais que tu as moins de 18 ans ! Sors, et vite ! :p)
Claim : Tout dans cette fiction, du scénario aux personnages, m’appartient. Toute reproduction ou utilisation libre est interdite sous peine de lente agonie et autres tortures affreuses et inhumaines. Oui monsieur, parfaitement !
Disclaimer : Suzuki, Honda et les autres ne m’appartiennent pas. Eh non. Zut alors ! De même, bien que l’action se passe à Marseille, il ne s’agit pas de la ville réelle. Juste une reconstruction imaginée par ore-sama.



Cette fiction est loin, bien loin d'être mon premier écrit (je dois avoir mon tout premier quelque part dans un carton, caché depuis une dizaine d'années ^^;), et n'est pas non plus mon premier Boy's Love.
C'est pourtant le premier Boy's Love que je publie sur le net... non pas parce que j'y crois à fond (je n'aime jamais mes écrits), mais parce... heu, bah en fait, parce que je cherche la reconnaissance éternelle et universelle de mon Talent Supérieur *débile*

Oui, c'est de l'humour, je précise...

En fait, comme je suis minable pour l'écriture, je cherche surtout à avoir quelques avis de quelques lecteurs perdus dans le coin... Alors commentez sans craindre pour mon amour propre ! (j'en ai aucun, aucune fierté non plus ! Sisi, j'vous jure...).

Enfin bon bref, je sais que tout le monde s'en fout de ma vie...

Kiss !

Kal'



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Partie I

Chapitre 01 - a
Chapitre 01 - b
Par Kalsang - Publié dans : Le Prince et le Pauvre
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Dimanche 7 décembre 7 07 /12 /Déc 18:15
Le Prince et le Pauvre
Kalsang



Partie I
Chapitre 01 - a



Marseille. Une grande ville française côtière de 827 000 habitants. Environ. De toute façon, on s’en fout.

Dans le troisième arrondissement, près de Saint Charles, se tenait un modeste petit magasin de CD, où l’on vendait du neuf aussi bien que des occasions, des nouveautés aussi bien que des très vieilles musiques, des CD aussi bien que des 45 tours… Quelques instruments de musique d’occasion étaient accrochés aux murs, attendant d’être repérés par un amateur sans le sou.

En ce mardi après-midi, un jeune homme de dix-neuf ans, répondant au nom de Thomas, pianotait d’une main distraite sur le comptoir de la boutique « Tout Temps Musique », prenant soin d’observer un couple d’adolescents qui traînait du côté des variétés françaises en jetant régulièrement des coups d’œil dans sa direction.

Le garçon avait la main sur l’épaule de sa copine, espérant bloquer le bras de cette dernière à la vue de Thomas. Bras qui soulevait et reposait régulièrement quelques CD avec nonchalance.

Rien de tout ça n’inspirait confiance au jeune vendeur.

« Vas-y, qu’est’t’as à nous regarder comme ça, Poil de Carotte ? » s’énerva finalement le garçon, en remarquant que Thomas ne le lâchait pas de vue.

« "Poil de Carotte" ? Oh, tu me blesses, on me l’avait encore jamais sortie celle là… » répondit Thomas d’un ton faussement peiné, une main théâtralement posée sur son front.

Non, mais sérieusement, un truc étonnait quand même beaucoup le rouquin.

« Eh, où tu as entendu ce nom, d’ailleurs ? Tu vas à l’école, toi ? Tu as vu le bouquin perdu entre deux BD ? Ou tu l’as entendu quelque part sans trop savoir ce que ça voulait dire ?

— Pfff, pauvre con !

— Non, vraiment, j’aimerais savoir !

— Viens Elza, on s’tire ! »

L’adolescent attrapa sa copine par la manche et la tira vers la sortie en regardant furieusement vers Thomas. Et un CD venait d’être sauvé…

Thomas Duval connaissait bien ce genre de gosses, il avait été comme ça lui aussi quand il était plus jeune. Avant de commencer à s’attaquer à plus gros qu’un minable CD dans une petite boutique… bien plus gros.

Ils bousculèrent une vieille dame qui entrait dans la boutique avant de disparaître dans la ruelle.

« Vous allez bien mademoiselle Perkins ? » demanda Thomas en se précipitant vers la dame qui se tenait les reins en fixant la porte. Il était de coutume de s’inquiéter d’un hypothétique client, si l’on ne souhaitait pas voir s’envoler son porte-feuille en même temps que l’acheteur…

« Ces jeunes, vraiment, je ne les comprendrai jamais, non non, jamais… » souffla-t-elle.

Thomas eut un léger sourire (ou plutôt un léger retroussement des lèvres… il n’était pas très souriant). Si elle pouvait critiquer, alors elle allait bien !

« Et qu’est-ce que je peux faire vous, mademoiselle Perkins ? » demanda-t-il doucement en retournant s’asseoir derrière le comptoir.

Fidèle cliente de quatre-vingt ans, elle arrivait à peine au torse de Thomas, mais faisait bien trois fois sa masse corporelle… Elle portait toujours les mêmes immenses robes fleuries, et ses cheveux gris étaient coiffés de minuscules frises.

« C’est ma petite nièce. Vous savez, celle qui a douze ans ? Eh bien pour son Noël, elle m’a demandé le CD de ces gens qui passent à la télé. Oh moi bien sûr, je ne regarde jamais la télé – c’est tellement dépravé de nos jours – mais elle, ses parents la nourrissent à ça. Les gamins n’auront bientôt plus une once de culture. Mais que puis-je dire. Si j’avais des enfants, je peux vous assurer que je ne les laisserais pas regarder cette chose, oh non jeune homme ! Rien ne vaut un bon bouquin, c’est moi qui vous le dis ! Et vous imaginez ce que ça doit donner à l’école ? Vraiment ! Vous, vous aimez la télé ? »

Oui, et elle était également une grande bavarde… Thomas avait du mal à se retenir de bailler, mais son air étonnamment bovin aurait alerté n’importe qui de pas trop égocentrique, ce qui n’était manifestement pas le cas de mademoiselle Perkins.

« J’en ai pas… » eut à peine le temps de dire Thomas.

« Eh bien c’est tant mieux ! Je suis sûre que vous étiez meilleur élève grâce à ça, sans perdre votre temps à vous liquéfier le cerveau. Vous étiez bon élève ?

— Le meilleurs, et j’aime tellement l’école que je suis encore en terminale ! Je veux pas quitter le lycée, c’est si… » déclara-t-il, à peine ironique.

« Oui, mais vous travaillez… Ces jeunes, maintenant, ils font rien, ils attendent que tout leur tombe cuit entre les mains. Travailler à dix-huit ans, aucun autre n’y penserait, c’est moi qui vous le dis !

— J’ai vingt ans…

— Oh, oui, et vous avez déjà cette boutique et vous écoutez les déboires d’une vieille fille comme moi, vous êtes tout à fait charmant ! » acquiesça-t-elle vivement en ponctuant sa phrase d’un petit rire haut perché.

En même temps, il n’avait pas d’autre choix que de la laisser converser en grognant de temps en temps… elle devait vraiment aimer s’écouter parler.

Mademoiselle Perkins était une vieille fille qui vivait non loin de la boutique. Elle passait régulièrement pour acheter des vieux disques de Francis Lopez ou des grands classiques de l’opéra (entre autres).

« Vous cherchez donc un CD ?

— Oui, ces jeunes là, qui passent à la télé ! Tous les gamins en sont friands, c’est d’une telle niaiserie…

— Y’a pas mal de jeunes qui passent à la télé, ces temps-ci ! »

La vieille dame commença alors à fouiller dans son sac à main, étalant porte feuilles et papiers divers sur le comptoir. Elle tendit ensuite un bout de journal déchiré à Thomas.

« Ma sœur m’a écrit ça ! »

Dans son fort intérieur, Thomas soupira en voyant qu’il s’agissait d’un CD sortit par la première chaîne de télévision française, où un groupe de jeunes gens chantant aussi bien que des casseroles s’évertuait à massacrer quelques chansons tout aussi minables qu’eux. Dans le fond, il était d’accord avec mademoiselle Perkins… la télévision rendait con. Et accessoirement, avilissait la musique de manière ahurissante.

Il alla récupérer l’album dans un des rayons « bouses actuelles » (ou plutôt « variétés françaises - nouveautés ») et le posa à côté du sac de la vieille dame une fois le prix scanné.

« Ça fera quinze euros soixante. »

Mademoiselle Perkins partit avec son précieux disque, en maugréant une dernière fois contre le temps pluvieux, avant de laisser Thomas seul avec sa caisse enregistreuse.

- x -

Dans la vie de Thomas, il n’y avait pas grand-chose à part la musique. Mais ce « pas grand-chose », il souhaitait parfois pourvoir y échapper. C’est ce qu’il pensa alors qu’un grand jeune homme brun et plutôt baraqué entrait dans la boutique avec un sourire froid.

« Thomas ! Je suis ravi de te voir ! » s’exclama-t-il, si faussement que personne n’aurait été trompé.

« Alfred… j’aimerais bien te dire "moi aussi", mais nous savons tous les deux qu’il est inutile de mentir…

— Toujours le mot pour rire, hein… On t’a pas encore buté ?

— Faut croire que je refuse d’aller vers la lumière... »

Le plus discrètement possible, Thomas leva la clef de la caisse pour la cacher dans la poche de son vieux jean. Mieux valait prévenir…

« C’est pas que tu m’ennuies, mais que me vaut le malheur de ta visite ? »

Alfred eut un sourire mauvais en s’avançant un peu plus vers le comptoir.

« On a repéré une Porsche dans le douzième. On pense pouvoir la choper ce week-end.

— Et vous avez besoin de moi ? » demanda doucement Thomas en s’asseyant sur son tabouret.

« Depuis que Timmy est en taule, nous manque un type pour faire le guet.

— Hm… »

Il réfléchit deux secondes avant de secouer la tête.

« J’fais un remplacement pour les Dark Night, j’pourrai pas venir. »

Alfred n’eut pas l’air d’apprécier ce refus de la part de Thomas.

« Tu crois que je t’ai demandé ton avis ? »

Son faux sourire avait complètement disparut de sa figure, laissant place à un visage menaçant qui aurait même pu fait se pisser dessus un chiot. Au moins.

« Et tu remplaces pour quoi, cette fois ?

— Batterie, parait qu’Andy s’est fait tabasser. »

Alfred se redressa et commença à visiter les rayons, sortant de temps à autre un CD pour regarder la pochette avant de le déposer sur un autre rayon, à l’opposé de sa place première.

« C’est qu’une tantouze, ils ont fait ça pour le bien de la communauté… »

Thomas se retint de grincer des dents en entendant le surnom qu’Alfred avait donné à un de ses (rares) potes. Personne, et il disait bien personne, n’avait le droit de traiter Andy de tantouze, à part lui.

Andy était un homosexuel notoire, il faut dire qu’il ne s’en était jamais caché. Il était ce qu’on pouvait appeler quand on était un peu mauvais une « folle », et le parfait cliché de l’homosexuel épanoui. Il parlait d’une voix suraiguë, portait des vêtements moulants et colorés, avait des manières précieuses… Sa seule chance avait été de tomber sur quelques personnes qui, si elles avaient tout de même du mal avec l’homosexualité, avaient su repérer ses dons pour la batterie avant tout… Et même si les autres membres du groupe gardaient une distance évidente avec lui (du genre « t’es bien sympa, mais t’approche pas, j’aime les filles »), Andy n’était pas malheureux pour autant.

« Et pour la Porsche ? rappela Alfred.

— Le concert fini à quatre heures du matin, puis c’est à Aix et je vais devoir dormir sur place.

— Tu peux pas annuler ?

— Je pourrais, mais j’ai pas envie. »

Alfred eut alors une lueur malveillante dans le regard, et s’approcha du comptoir pour regarder Thomas avec un visage menaçant.

« N’oublie pas à qui tu dois la vie, Tommy… souffla-t-il.

— J’oublie surtout pas à qui je dois d’avoir presque perdu mon œil gauche, Al… » rétorqua le rouquin sur le même ton, un doigt glissant sur la longue cicatrice qui ornait sa joue, du milieu du front jusqu’à son arcade sourcilière, puis de sa pommette à sa mâchoire.

Alfred sourit une nouvelle fois.

« J’ai déjà payé pour ça… »

Thomas ne lâcha pas son regard mais ne dit pas un mot pour autant. Non, de son point de vue à lui, rien de se que pourrait faire Alfred ne le rachèterait pour sa lâcheté.

« Ok, on fera la Porsche sans toi… ça f’ra plus de fric pour nous. »

Sur ce, Alfred quitta la boutique avec un vague geste de la main, laissant Thomas dans une profonde réflexion.

Il était vrai qu’il avait besoin de cet argent, il avait repéré un clavier qui lui plaisait pas mal. Mais il avait fait une promesse à Andy. Et si Thomas ne pensait rien devoir à qui que ce soit, son ami était pour lui l’exception qui confirmait la règle.


(à suivre dans le chapitre 01 - b)
Par Kalsang - Publié dans : Le Prince et le Pauvre
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Lundi 8 décembre 1 08 /12 /Déc 19:57
Le Prince et le Pauvre
Kalsang



Partie I
Chapitre 01 - b



Sur le stand, à côté du circuit d’où s’échappait le bruit des quelques motos lancées à pleine puissance, un adolescent brun de dix-sept ans regardait le numéro huit qui n’avait plus que quelques minutes à faire avant le changement de pilote.

« Bill… tu as parlé avec ton père, récemment ? » demanda Martin Chêne, l’oncle de l’adolescent. Un grand homme moustachu d’une quarantaine d’années, aux cheveux grisonnant et au ventre rond témoignant des nombreuses bières qu’il descendait quand il était seul chez lui.

L’adolescent repoussa nerveusement une mèche de cheveux qui refusait de se laisser dompter, et hésita un instant avant de répondre.

« Pourquoi faire ? C’est toujours la même chose avec lui…

— Il fait ça pour ton bien, pour ton avenir, tu le sais, hein ?

— Mon avenir ? Je pense parfois qu’il n’a même pas conscience que c’est moi qui vivrai mon avenir. »

Le regard de son oncle s’attarda une nouvelle fois sur le coureur numéro huit qui passait avec brio un virage plutôt raide, se maintenant confortablement à sa quatrième place (quatrième sur dix coureurs était une place plutôt modeste).

« Il veut ce qu’il y a de mieux pour toi. »

William soupira doucement en secouant la tête.

« Je le sais, et je ne lui en veux pas, seulement… Comment quelque chose que je déteste pourrait être ce qu’il y a de mieux pour moi ?

— Mon garçon… qu’est-ce que tu veux faire d’autre ? »

Le brun quitta le huit des yeux pour regarder son oncle.

« Je veux courir, » déclara-t-il simplement.

Martin lui rendit son regard avec une certaine tristesse. William savait ce qu’il pensait, et il savait que son oncle avait raison, mais cependant…

« C’est un doux rêve que tu as là, Billy. Mais tu dois te réveiller… il n’y a aucun avenir dans le monde de la moto, ceux qui réussissent sont rares.

— Je sais ce que tu penses de tout ça, Martin. Et je sais que dans le fond, tu as parfaitement raison. Cependant…

— Cependant, tu crains de ne jamais être heureux si tu suis les directives de ton père, » termina Martin.

William acquiesça, portant à nouveau son regard sur le coureur.

« Comment pourrais-je être heureux, à faire quelque chose que je hais ?

— Tu y gagneras la reconnaissance sociale, toutes les portes te seront ouvertes, tu ne manqueras jamais de rien…

— Et je pourrai me trouver une charmante petite femme, faire de jolis petits enfants et vivre dans un pavillon en bord de mer, une piscine de billets dans le sous-sol, et vivre heureux jusqu’à la fin des temps dans ma petite vie paisible et prospère, loin des dangers des deux roues… » conclut l’adolescent, essayant de ne pas montrer une trop grande ironie en parlant de femme et d’enfants…

Martin eut un petit sourire en coin.

« C’est précisément ça. »

L’homme fit un petit signe de main à l’un des assistants pour prévenir le coureur huit qu’il était temps de rentrer au stand.

William enfila lentement ses gants, essayant de contrôler les tremblements d’excitation que lui procurait la lente montée d’adrénaline. Sa conversation avec Martin l’avait agacé, mais l’idée qu’il ne lui restait que quelques minuscules minutes avant de monter sur la moto venait de le rendre subitement euphorique. Alors maintenant, ses petits soucis matériels avec son père n’existaient plus, la légère leçon de morale de Martin était loin. William avait ce don de ne jamais rester ennuyé bien longtemps.

Son oncle, et accessoirement le patron du moto-club de l’adolescent et manager de l’équipe, lui tendit son casque.

« Tu es prêt ?

— Je suis prêt, » répondit-il en essayant de ne pas sourire comme un idiot.

« N’en fais pas trop, nous visons uniquement la troisième place, d’accord ? Ce n’est même pas une course "officielle". »

L’adolescent acquiesça, trop impatient pour parler. Et puis, même si son oncle lui conseillait de ne pas voir trop haut, lui ne comptait absolument pas obéir. Il voulait la première place, et il l’aurait. William ne cherchait pas la médiocrité, mais la perfection, et tant pis si c’était dans une course dont personne ne se souviendrait.

Mais il voulait prouver, après la discussion qu’il avait eue avec Martin, que son rêve n’était pas si utopiste que cela.

« Elle arrive … » annonça son oncle.

L’adolescent sautilla légèrement sur place. Bon, d’accord, peut-être devrait-il parfois savoir rester digne et pas passer pour un abruti complet devant la foule… et alors ? C’était sa première course depuis des mois, une course d’endurance de deux heures au circuit de Lédenon. Il avait réussi l’épreuve de qualification la veille, avec Chris.

Enfin, la moto vint s’arrêter à leurs côtés, et une haute silhouette en descendit.

« Elle tire sur la droite, oh, et Bill, fais attention, il y a une flaque glissante juste avant le virage du Pont… » annonça la jeune femme qui venait d’ôter son casque, regardant en direction de l’adolescent.

Si l’on voulait donner une vision très cliché du monde de la moto, alors Christelle Maxime n’avait absolument rien de la motarde typique. Il s’agissait d’une femme magnifique, aux longs cheveux noirs bouclés qui cascadaient sur ses reins, aux grands yeux verts parfaitement maquillés et à la longue silhouette fine toute en muscles discrets. Elle tenait plus du mannequin un peu trop rond que de la motarde, et même William (qui n’était pas très intéressé par les filles… pour ne pas dire pas du tout) la trouvait magnifique. Mais elle restait, malgré sa féminité, une équipière de choc pour William.

« Merci, Chris… » répondit-il, attendant le plus patiemment possible que le responsable mécanique donne son feu vert.

« Si elle tire à droite, il faudrait… intervint Martin.

— On n’a pas le temps, on est en train de perdre des places… » le coupa rapidement William. « Je peux très bien rouler même avec ça…

— Vu, mais il y a des risques qu’elle tire encore un peu… on n’a pas le temps, déclara le mécanicien.

— Et dire que votre boulot, c’est d’être rapide… » se moqua William en enfourchant la moto délaissée, puis regarda une dernière fois vers Martin et Christine.

« Souhaitez-moi bonne chance ! » lança-t-il en baissant la visière de son casque, avant de filer à toute allure.

« Ce gosse est inconscient… » soupira Martin en le regardant s’éloigner.

Maintenant qu’il avait démarré, William n’avait plus de tremblements d’excitation ni de joie euphorique. Il n’existait plus que sa moto, la piste infinie et sa fulgurante montée d’adrénaline. Il aurait pu passer des heures ainsi, à aller toujours plus vite.


- x -

 

Le dernier tour, déjà. William avait réussi à remonter à la quatrième place, ce qui était parfait du point de vue de sa team, mais pas du sien.

Aux yeux de certaines personnes, le brun avait une vie "parfaite" de petit gosse de riches, et ils n’auraient pas compris son engouement pour la moto.

D’autres auraient dit que, s’il aimait tant ce sport, c’était uniquement une lubie de riche pour s’attirer le grand frisson et prouver qu’il était en vie.

Mais pour Bill, c’était plus simple que ça. Il aimait la moto.

Il aimait sentir le corps de sa moto vibrer sous lui, il aimait voir la piste défiler à toute vitesse. L’adrénaline était devenue sa drogue, anesthésiant la partie de lui qui lui soufflait que c’était dangereux, qu’au moindre problème il pouvait se tuer ou finir paralysé.

C’était son unique passion.

Le circuit était le seul endroit au monde où il se sentait être enfin véritablement lui-même.

Alors qu’il arrivait au premier virage de son dernier tour, il augmenta un peu les gaz afin de doubler celui qui le précédait, mais le pilote ne semblait pas être du même avis et leur lute n’en fut que plus acharnée. William réussit finalement à le doubler sans vraiment réaliser ce qui s’était passé. Troisième place. Le numéro quinze n’était pas loin devant, et il fixait sa moto comme si ça pouvait lui permettre de se téléporter.

Ce fut au virage du Pont qu’il sentit sa moto partir seule, et il eut un mal fou à ne pas en perdre totalement le contrôle. La flaque dont Chris lui avait parlé ! Il manqua de créer un carambolage quand la moto de cinquième place fit un écart brutal pour l’éviter.

« Bon sang ! » grogna le jeune homme sous son casque. Son équilibre retrouvé, il fonça à nouveau essayer de récupérer les trois places qu’il venait bêtement de perdre.

Mais ce fut peine perdue.

« C’est pas vrai ! » jura-t-il bien plus tard, alors qu’il quittait son casque et que les trois premières places recevaient les congratulations de tous. Il avait bien réussi à remonter un peu, mais arriver cinquième sur la ligne d’arrivée n’avait jamais été son but !

Martin et Chris se précipitaient vers lui, l’un furieux et l’autre apparemment plus inquiète.

« Tu es un idiot, Bill !

— Tu ne t’es pas blessé ? Equipe médicale ! »

L’adolescent grogna et jeta furieusement son casque à terre, mais l’adrénaline étant retombée il sentit alors une vive douleur sur le muscle de son avant-bras droit.

« Zut, j’ai dû me faire une foulure…

— Je t’avais dit que ce n’était pas la peine de trop en faire !

— Oh, Bill, ça te fait beaucoup mal ? »

Le plus gros défaut de Chris était qu’elle se mettait à pouponner comme une mère en manque de nourrisson dès que le jeune homme avait le moindre petit bobo. Instinct maternel surdéveloppé chez cette jeune femme de vingt-deux ans.

Alors que l’infirmier d’urgence s’appliquait à passer de la crème sur son muscle douloureux avant de le bander, William écoutait distraitement son oncle lui lancer toute sorte de remontrances dont il se serait bien passé. Comme si c’était de sa faute si le circuit était glissant !

Depuis le temps qu’il attendait l’occasion de participer à une course… et il avait réussi à se planter en beauté. C’était vraiment rageant !

« Bill Jones ? »

Une voix inconnue le tira de sa si profonde réflexion qui l’occupait alors qu’il faisait semblant de paraître coupable face à son oncle.

« Oui ? »

Un vieil homme moustachu lui faisait face, vêtu d’un splendide costume et droit dans toute son élégance.

« Je m’appelle Kevin Durano, je suis de la team de Suzuki, » se présenta-t-il en lui tendant la main, que William serra sans se faire prier.

« J’ai remarqué votre course aujourd’hui, j’aime chercher des nouveaux talents. Vous êtes un attaquant, très à l’aise sur votre moto malgré votre jeune âge… Je voulais juste vous encourager. Travaillez un peu plus cependant…

— Mer…ci ? »

L’homme lui adressa un sourire, avant de tourner les talons et de laisser place à Chris, qui avait écouté la discussion de manière très peu discrète.

« Dommage que ton père soit toujours derrière toi. T’imagine si tu pouvais faire autant de moto que tu le voulais ? "Bill Jones" serait déjà célèbre…

— Si j’arrivais à convaincre mon père, peut-être que… » lâcha William, plein d’espoir.

Légèrement rêveur, il partit finalement quitter sa combinaison pour remettre ses vêtements civils et redevenir un adolescent de dix-sept ans plutôt normal, et la différence était flagrante. Peut-être même que personne n’aurait reconnu "Bill", au premier coup d’œil.

"Bill" était un adolescent passionné de moto qui arrivait toujours à se qualifier pour des courses qu’il ne gagnait jamais. Il ne faisait pas grand cas de ses cheveux en bataille qu’il cachait rapidement sous son casque. Sa combinaison rendait sa silhouette longiligne sans pour autant réussir à cacher un petit ventre certes discret mais témoignant du fait qu’il ne manquait incontestablement pas de nourriture.

Quand il quittait cet attirail pour redevenir William Lecomte, ses cheveux redevenaient disciplinés, ses vêtements parfaitement pliés et propres renforçaient son côté BCBG de fils d’un grand chef d’entreprise. Il marchait droit et fier.

Peut-être que son sourire et son air rêveur étaient les seules choses que "Bill" et "William" avaient en commun.

L’adolescent sortit son téléphone portable de sa poche et remarqua qu’il avait reçu un message pendant qu’il était sur le circuit…

« Si t’es toujours ok, on se retrouve samedi à vingt et une heures, sur le Mirabeau. Kiss ! »

Bill sourit et envoya un message de confirmation à son ami, puis téléphona à son chauffeur.

« Edgar, j’écoute ?

— Bonjour, c’est William.

Que puis-je pour vous, monsieur ?

— J’aimerais rentrer plus tôt que prévu, vous pouvez venir me chercher chez mon oncle vers dix-sept heures ?.

Comme vous voudrez, monsieur.

— Merci bien. Et pas un mot à mon père, » puis il raccrocha sans plus de cérémonie, pour rejoindre son oncle et Chris qui s’apprêtaient à rentrer à Nîmes.

« Eh, Bill, tu vas toujours au concert samedi ? » demanda Chris alors qu’ils montaient dans la voiture.

« Oui.

— Tu sais toujours pas qui jouera ?

— Heu… plusieurs groupes, il me semble…

— Je vois.

— Tu veux venir ? » proposa-t-il, voyant très bien ce qu’essayait de lui arracher la jeune femme. Elle cherchait à lui faire dire ça depuis le jour où il lui avait avoué avoir un ami fan de musique qui voulait l’entraîner dans un concert.

« Je peux ? Ça va pas ennuyer ton ami ? demanda-t-elle, toute excitée.

— Je ne pense pas… » sourit Bill.

Encore une fois, le jeune William Lecomte allait cacher ses intentions à son père si strict. Il ne lui dirait pas pourquoi il avait dit avoir cours cet après-midi là alors que le professeur l’avait reporté depuis des semaines. Il lui cacherait son intention d’aller à Aix le week-end prochain.

Il ignorait encore que tous ces mensonges auraient des conséquences insoupçonnées.

 

(à suivre dans le chapitre 02 - a)

Par Kalsang - Publié dans : Le Prince et le Pauvre
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Samedi 3 janvier 6 03 /01 /Jan 21:08

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Le Prince et le Pauvre

By Kalsang

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Partie I

Chapitre 02

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« Où est Andy ? » demanda Thomas alors qu’il montait dans la minuscule cinq chevaux de Franck.

Petit brun aux yeux verts ornés de profonds cernes noirs, d’une maigreur maladive et blanc comme un linge, Franck était le guitariste et leader officiel des Dark Night. C’était lui qui avait créé le groupe et “engagé” les musiciens. Parfois, il semblait à Thomas que sa seule réelle ambition dans la vie était de finir comme Sid Vicious ou Kurt Cobain.

« Il est déjà à Aix, en train de se faire bichonner par son mec, » déclara Patrick, le chanteur et leader officieux. Patrick avait quant à lui des cheveux blond, bouclés et assez courts, et était le chouchou de ces dames avec son corps parfait. Quand Franck était trop défoncé pour leader le groupe – et ça arrivait souvent – c’était lui qui en prenait naturellement la tête. C’était un jeune homme franc et calme.

Franck eut une petite grimace de dégoût.

« Y peut faire ce qu’y veut d’son cul, mais n’a pas besoin d’le savoir… déclara-t-il sèchement.

— Arrête de bouffer la moitié de tes mots, Franck, soupira le chanteur.

— Cause toujours… »

Même s’il n’en disait rien, Thomas était bien d’accord avec le guitariste. Franchement, qui ça intéressait, la vie des autres ? Sûrement pas lui…

« Et Fred ?

— À la recherche désespérée d’une basse… »

Thomas roula des yeux. On pouvait compter sur Dark Night pour manquer cruellement d’organisation, la preuve étant qu’ils s’étaient décidés à chercher un remplaçant pour Andy qu’une semaine avant le concert, et de toute évidence à chercher une basse quelques heures avant le dit concert…

Heureusement pour les Dark Night, Thomas était le remplaçant “officiel” du groupe. Il pouvait jouer à la place de n’importe qui – sauf de Patrick.

Il avait déjà rendu service à plusieurs reprises au groupe. Le plus souvent à la guitare, quand Franck était trop stone pour jouer, et une fois à la basse. Ce n’était pas la première fois qu’il remplaçait à la batterie, mais c’était en revanche bien la première fois qu’il allait jouer sans que Andy ne soit là. En principe, le garçon pouvait se retrouver au clavier (où il était encore plus doué que la batterie) quand le style du concert rendait sa présence nécessaire, et alors Thomas était à la batterie.

Andy était talentueux, et Thomas savait jouer de beaucoup trop d’instruments pour être vraiment fort sur un seul d’entre eux.

« Hé, Tom, ça fait combien de temps que t’as pas été sur scène ? » lança alors Patrick, histoire de faire la discussion, alors qu’il conduisait à vive allure sur la voie rapide (il avait refusé à Franck, encore trop à l’ouest à cause de son dernier shoot, de prendre le volant).

Thomas réfléchit un instant à la question, incertain.

« Trois mois, il me semble.

— C’était pour quoi ?

— Un concert de Jazz à Nice.

— Tu jouais de quoi ?

— Trombone. »

Franck éclata d’un rire gras et moqueur.

« Un batteur d’groupe punk qui va jouer du trombone, c’d’un ridicule ! »

Thomas ne le rejoignit pas dans son hilarité. Il aimait la musique, et il ne trouvait rien de ridicule au trombone, par conséquent il avait pris son pied et si Franck Je-Sais-Rien-Faire-D’autre-Que-Tripoter-Ma-Gratte ne le comprenait pas, il pouvait bien aller se faire mettre.

« Moi je trouve ça bien, t’es éclectique…

— Et comment t’as fait pour ta dégaine ?

— J’étais à poils, » déclara le roux d’un ton neutre.

Patrick lui adressa un sourire complice à travers le rétroviseur intérieur.

Il était très difficile d’imaginer que Thomas, qui avait toujours des jeans déchirés et sweet-shirts trop grands pour lui, avec ses cheveux roux en bataille et ses nombreux piercings aux oreilles, pouvait parfois se déguiser en type “classe”.

« À quelle heure on passe ? » continua Thomas, alors que Franck était encore en train de s’imaginer comment Thomas avait pu rester à poil devant des centaines de spectateurs.

« Vers une heure je suppose, on est dans les derniers groupes à passer mais ils veulent quand même que tout le monde soit là au début de la soirée, histoire de se réorganiser si y’a des absents. »

Thomas hocha distraitement de la tête, regardant le paysage qui défilait à toute allure sous la lumière des phares des autres voitures.


- x -


« Tommy chou ! » cria une voix suraiguë alors que les trois musiciens quittaient le parking souterrain où ils avaient garé leur voiture – les frais leur seraient remboursés par les organisateurs – pour se diriger vers la salle de concert.

Une espèce d’énergumène vêtue d’un pantalon bleu, si moulant qu’il en devenait presque transparent, et d’une veste blanche cintrée avec de la fourrure au col ; ses cheveux blond mi-longs tombaient en larges ondulations gracieuses sur ses joues et son visage était orné d’un maquillage si parfait qu’il masquait pratiquement son œil gonflé et sa lèvre fendue ; arrivait à toute allure en direction des garçons.

« Mon poussin ! Ça me fait trop plaisir de te voir enfin ! »

L’énergumène serra Thomas d’un bras, l’autre maintenu par un bandeau contre son torse à cause de son plâtre. Car oui, l’énergumène n’était autre qu’Andy, le batteur/pianiste/homosexuel… et probablement en passe de venir transsexuel de Dark Night.

« Dire que tu n’es même pas venu me voir à l’hôpital, j’étais siiiii triste.

— Et te voir tout contusionné, en pyjama, sans maquillage, pas coiffé et dans les vapes à cause des médocs ? Mais je veux garder une bonne image de toi ! » répliqua le rouquin, non sans ironie.

« Quand vous en aurez fini avec les papouilles, on pourra y aller ? On se pelle les burnes ! » grogna Fred. Le bassiste était un grand noir bodybuildé au crâne rasé, ayant toujours tendance à se montrer grognon – Thomas, lui, n’était pas grognon mais sarcastique. Ce n’était pas pareil.

Parmi les Dark Night, tous s’étaient arrangés d’un commun accord pour accepter Andy tel qu’il était tout en gardant une certaine distance entre les autres et lui – surtout Franck, qui semblait avoir peur que l’homosexualité ne soit une maladie contagieuse.

Thomas lui s’en fichait pas mal. Les mauvaises langues diront que Thomas se fichait de tout, ce qui n’était absolument pas vrai. Du tout. Mais ce n’était pas comme si Andy n’avait pas déjà un mec dans sa vie, ni n’ignorait que Thomas était hétéro ; et Thomas savait bien que ce n’était pas parce qu’il était gay qu’Andy se jetait sur tout ce qui avait une paire de couilles.

Et s’il haïssait les contacts physiques, il devait bien avouer que ça ne le dérangeait pas que Andy soit si tactile. Il le connaissait depuis trop longtemps et était trop ami avec lui pour ça.

Thomas était sorti pendant longtemps avec la grande sœur du jeune homme, et ils étaient devenus amis alors que le roux avait quinze ans et Andy dix-sept, suite à un accident qu’avait eu Thomas.

D’un commun accord, tout le petit groupe rejoignit la salle de concert, où un groupe s’était déjà installé pour jouer.

« Ton copain n’est pas là ? » demanda Patrick, alors que tous s’asseyaient dans une loge pour vérifier une dernière fois si personne n’avait oublié l’ordre des chansons.

« Il devrait arriver un peu plus tard, il avait quelques trucs à régler, annonça Andy avec un grand sourire.

— Combien de temps il nous reste ? s’enquit Fred.

— Au moins trois heures, » déclara Patrick en regardant sa montre. « On a le temps de discuter de ça avec Tom… »

Thomas quitta l’examen attentif de son vernis noir écaillé. Lui parler de quoi ?


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Quand Chris poussa la porte, William remarqua immédiatement que la jeune femme frémissait d’excitation, et elle avait tellement voulu assister à ce concert que ça n’avait rien d’étonnant. William aurait bien aimé partager son bonheur, mais il ne connaissait vraiment rien au rock et n’était pas sûr d’apprécier… Mais ça ferait plaisir à son ami de le voir enfin, depuis le temps qu’ils n’arrivaient pas à se trouver un moment de libre pour se retrouver.

« Tu le rejoints où ? cria Chris pour se faire entendre par-dessus la musique.

— N’importe, il me trouvera facilement. On va au bar ? »

Elle acquiesça et ils s’installèrent sur les tabourets devant le comptoir pour boire un verre.

« Bill ! Il est comment, ton pote ? »

Le garçon sourit un bref instant et lui répondit de manière évasive.

« Très tape-à-l’œil, on peut le reconnaître de loin.

— Il est sympa ?

— Une perle.

— Mignon ?

— D’une certaine manière…

— Célibataire ?

— Plutôt branché testostérone…

— Hein ?

— Tiens, le voilà ! »

Une masse voyante slalomait entre les danseurs avec adresse, un sourire éclatant aux lèvres.

« Quelle horreur… » grogna Chris en comprenant enfin.

Le… garçon ? serra longuement William dans son bras avant de lui coller une bise sur chaque joue.

« Bunny, je suis tellement content de te voir ! Pardon pour mon retard, on essaie d’entraîner un pote dans notre chute. Et qui est cette beauté ? »

La grimace de Chris n’échappa pas à William, pas plus que son commentaire précédant ne lui avait échappé. Il avait bêtement pensé que, vu qu’elle était une fille, elle s’en ficherait un peu de rencontrer un garçon comme Andy. Une “folle” qui avait suffisamment de cran pour s’assumer entièrement tel qu’il était – et peut-être même un peu trop. Visiblement, il avait une fois de plus eu tort… sa naïveté le perdrait un jour.

« C’est Chris, ma coéquipière.

— Enchanté Chrissy, je suis Andy ! Le batteur des Dark Night, ils passeront tout à l’heure. »

La motarde ne manqua pas le plâtre, et le jeune homme sourit devant l’évidente question muette.

« Bien sûr que non je ne jouerai pas, Tommy chou me remplace ! »

Si Andy avait remarqué la distance que Chris avait mise entre elle et lui, il n’en laissait rien paraître. Andy avait cette capacité à ne jamais se démonter, quelle qu’en soit la raison… ou peut-être ne s’en rendait-il tout simplement pas compte ?

« Pardon, Willie chéri, je dois aller convaincre Tommy chou, je reviens vite ! »

William hocha la tête avec un sourire, puis reporta son attention sur Chris alors que le jeune homme s’éloignait.

« Comment t’as fait pour devenir pote avec ce… truc ? » grinça la jeune femme. William lui répondit avec le regard le plus noir qu’il pouvait lancer. N’y étant pas habitué, le résultat n’était jamais très concluant…

« Il est très gentil, si tu arrêtes de te fier à ta première impression tu le remarqueras bien assez tôt.

— Il est… homo ? »

Et moi donc… pensa l’adolescent

« Et alors ? se contenta-t-il de lancer.

— Comment tu l’as rencontré ? »

William s’agita un instant sur son tabouret, se demanda jusqu’où il pouvait raconter cette histoire.

« En boite. Il m’a dragué, j’étais pas intéressé, on est devenus amis, » résuma-t-il.

Et il n’avait pas besoin de préciser dans quelle boite c’était… Avouer à Chris qu’il avait été une fois dans une boite gay à Marseille, histoire de voir comment s’était, ne faisait pas partie de ses priorités dans la vie, et encore moins maintenant qu’il voyait sa réaction avec l’homosexualité d’Andy.

Bon, en même temps, Andy était très extraverti, et c’était le genre de garçon qu’on appréciait ou qu’on détestait.

« Tu n’as pas peur qu’il…

— Me saute dessus ? Essaie de me convertir ? Ça ne risque pas ! »

Et puis, comme si Andy était du genre à sauter sur les gens… heu, en fait oui il le faisait, mais dans cette optique !

Alors que l’adolescent adressait un signe de la main à son ami, qui revenait dans leur direction, Chris secoua la tête d’un air dégoûté.

« Écoute Bill, je te laisse avec ton pervers, j’ai envie de danser un peu. »

William acquiesça lentement, déçu, pendant que Chris allait s’amuser sur la piste.

« Ça va pas, Bunny ? » s’inquiéta Andy en revenant à côté de lui.

« Je crois qu’elle et moi, nous ne serons finalement pas amis en dehors du circuit… » annonça tristement William.

Andy lui tapota le dos, compatissant.

« T’en trouveras des mieux, » assura-t-il.


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« Titulaire ?

— On veut dire que tu serais un membre à part entière de Dark Night, » continua Patrick en souriant.

Fred, qui réglait les cordes de sa basse, ajouta d’une voix neutre : « on a commencé à composer nos propres morceaux depuis un moment, et faut avouer qu’ils sont pas mauvais.

— Un shoot, et j’peux écrire n’import’quoi ! » dit Franck, hilare pour quelques raisons connues de lui seul.

« Mais du coup, on a besoin de moi au clavier pour toutes les chansons, et il nous manquera un batteur, continua Andy.

— La batterie, c’est ton truc non ? Et pense un peu à toutes les filles que tu vas pouvoir te faire ! renchérit Patrick.

— Hum, le batteur c’est le type que tout le monde sait qu’il est là et que personne regarde, non ? Alors j’pense pas que ça marche… »

Andy trépigna sur place en regardant sa montre, puis s’excusa en quitta la pièce, prétendant aller voir un ami. Son petit ami, sans doute.

« Sûr, si tu veux que les filles te regardent, vaut mieux être chanteur ou guitariste, mais Franck et moi sommes minables à la batterie, et tu es minable au chant, donc…

— Trop aimable… »

Thomas chantait comme une casserole, mais était-il vraiment obligé de le lui rappeler ?

« On sait que tu bosses pas mal à la boutique, mais bon, les répètes, ça prend pas tout ton temps non plus, ajouta Fred de sa voix gutturale.

— Ouais, juste trois/quatre soirs par semaine… c’est si peu !

— On sait que t’as besoin d’argent, mais nous on a besoin de toi.

— Vous avez raison, un batteur c’est tellement dur à trouver quand on cherche pas…

— Mais c’toi qu’on veut, pas ‘mec qu’on connaît pas !

— C’est difficile de s’adapter à Franck, un nouveau mec tiendrait pas un mois.

— J’te merde, du con. »

Thomas et Patrick roulèrent des yeux d’un mouvement très synchrone, habitués aux échanges entre Fred et Franck.

« On peut s’arranger pour les répètes, dit Patrick, diplomate.

— Franchement, entre le bahut et la boutique, j’aurai pas le temps. »

Sans compter qu’il avait bien d’autres activités secrètes, mais ça il ne tenait pas à informer ses camarades…

« T’fais chier !

— Tu n’as pas le choix Tommy chou. »

Thomas regarda la porte claquer derrière un Andy légèrement perturbé.

« Ça va pas ? » demanda le rouquin. Non, non, il n’était pas inquiet. Juste curieux de savoir ce qui pouvait perturber Andy. Mais ce dernier chassa sa question d’un revers de la main, comme si elle n’avait pas la moindre importance.

« S’il te plaaaait, Tommy chou ! Fais ça pour nous et je te promets de te présenter tout plein de jolies filles!

— Non, merci.

— Bon, plein de jolis garçons alors ? »

Thomas répondit avec un regard qui en disait long sur son maque d’intérêt.

« Je vous donnerai ma réponse après le concert. »

Et alors Andy s’autorisa une petite danse du ventre de la victoire, pendant que Patrick et Fred se frappaient “discrètement” les poings. Ils croyaient avoir déjà gagné, ces cons…

Franck, lui, essayait sans doute de réfléchir au profond sens spirituel de ces paroles.

Ces types…

« Bon, je retourne voir Willie chéri ! » déclara Andy avec un entrain trop forcé aux yeux de Thomas.

Il s’approcha du jeune homme pendant que les autres membres du groupe discutaient chiffons et détachant miracle entre eux.

« Y’a un problème ? s’enquit-il doucement.

— Nan, c’est juste que Willie a ramené une copine homophobe, et je veux pas être méchant avec elle…

— C’est vrai que ça serait terrifiant, » ironisa Thomas.

Le blond lui sourit largement.

« Je vais faire peur à la demoiselle, casse-toi une jambe ! »

Et il quitta la pièce avec un dernier clin d’œil.


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- X -

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S’il y avait bien une chose que William admirait chez Andy, autre que son attitude extravertie, c’était son éternel optimisme. Et son débit de paroles inhumain aussi, mais du coup ça ne faisait plus “une chose”. Enfin bref.

Un peu plus tôt, Chris était venue voir William pour lui dire qu’elle avait croisé un de ses amis et qu’elle rentrerait avec eux, de toute évidence la présence de William ne lui était plus indispensable… ou peut-être était-ce celle d’Andy qui lui était insupportable.

William était quelque peu mal à l’aise face à cette situation, c’était dans ces moments là qu’il réalisait que tout le monde n’était pas forcément ouvert d’esprit face aux gens “différents”. Mais il l’oubliait bien vite…

« Bonsoir à tous, nous sommes Dark Night ! lança alors un grand blond dans le micro.

— C’est eux, c’est eux ! YOUUUUUUH ! » hurla Andy en tapant sur sa cuisse de son bras valide comme s’il applaudissait.

Et William était certain que le groupe l’avait entendu malgré le brouhaha, car le blond lança un sourire dans sa direction.

« Moi c’est Patrick et voici Fred ! » le noir leva haut sa basse. « Franck ! » le brun fit grincer sa guitare. « Eeeet Thomas ! » De là où il était, William ne devina qu’une masse de cheveux roux cachée derrière la batterie alors que le garçon faisait son petit solo de quelques secondes.

Son solo se transforma alors en intro sur lequel Patrick commença à chanter.

« Il est doué, hein ? »

William quitta sa contemplation du groupe d’Andy pour l’interroger d’un regard.

« Thomas, le batteur. C’est un petit prodige de la musique, tu lui mets n’importe quel instrument entre les mains et il comprend immédiatement comment ça fonctionne. Il pourrait aller loin, s’il n’était pas si idiot.

— C’est vrai qu’il est doué, » hasarda le brun avec un sourire, bien qu’il n’y connaissait pas grand-chose, et Andy n’était pas dupe pour un sou.

« Toi, tu as un don pour les motos et la mécanique. Ça serait idiot de perdre ça pour faire un truc que t’aime pas, tu trouves pas ? »

William était bien d’accord avec ça, si seulement Andy savait…

« B’en lui, c’est exactement ce qu’il fait. Il perd son temps à traîner avec des crapules et à faire plein de conneries. Il sait pas que j’suis au courrant, mais Jess n’est pas ma sœur pour rien. Son ex, » précisa-t-il à l’interrogation silencieuse du motard, bien que ce ne fût pas l’explication qu’il attendait.

« Tu tiens à lui, pas vrai ?

— C’est pratiquement mon frère. Il a des soucis avec ses vieux, alors Jess et moi on voulait l’adopter passé un moment, ajouta-t-il avec un sourire.

— Et plus maintenant ?

— Bah, il va avoir vingt ans, ça serait un peu inutile. Puis il compte emménager à l’arrière de son magasin de musique. »

William reporta son attention sur le groupe qui se produisait, et tenta de voir le visage du batteur qui était si précieux à Andy, mais il était trop éloigné de la scène pour distinguer son visage. Il sentit alors sa poche vibrer, et en sortit son téléphone.

« Ton père veut te parler. Rentre immédiatement. »

C’était court, direct, et légèrement angoissant. Sa mère, Emilie Lecomte, avait toujours tendance à couvrir William quand il disait sortir, et qu’elle lui envoie ce genre de message ne pouvait signifier qu’une seule chose : elle n’avait pas réussi à cacher la vérité à son père.

Maintenant, quelle vérité ? Savait-il où il était ce soir ? Ou alors… où il était mardi dernier ?

« Qu’est-ce qui va pas, Bunny ?

— Les ennuis qui commencent… »


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« Faut se dépêcher, j’ai promis à Willie chéri de lui trouver un chauffeur ! Il est déjà parti au quai des taxis, faut que je le rattrape, » pressa Andy alors que les garçons se rassemblaient une dernière fois dans la loge avant de remballer les instruments pour quitter la boite. « Alors, Tommy chou, ta réponse ? »

Tranquillement installé sur une chaise, grattant le vernis de ses ongles, Thomas soupira faiblement.

« Chais pas…

— Bon, je voulais pas en arriver jusque là, mais… »

Andy vint s’agenouiller devant le rouquin et posa sa main sur le genou du garçon avant d’essayer de capter son regard.

« S’il te plait ! Ou je te fais mon regard de cute-puppie-eyes auquel tu ne résistes jamais, je le sais bien, ça fait cinq ans qu’on est amis ! »

Le blond avait décidément une manière bien à lui de menacer les gens…

« J’veux bien essayer, mais juste pour toi ! »

Un grand sourire satisfait fut sa seule réponse.

« Merci trésor ! Maintenant, j’ai plus qu’à trouver un chauffeur pour Willie chéri !

— Il va où ton mec ? intervint Fred.

— À côté de Marseille, légèrement à l’extérieur de la ville.

— Je ramène les instruments au studio, j’le dépose si tu veux. »

Cela sembla ravir Andy, qui dit à Thomas d’aller directement à l’appartement avant de se précipiter pour aller avertir son petit ami de la bonne nouvelle.

Thomas se leva de son siège et adressa un vague signe aux garçons.

« J’y vais, je vous laisse. »

Sans un regard en arrière, le roux quitta la loge et sortit de la boite. Il devait retrouver Andy et Jess chez le nouveau petit ami de cette dernière. Là, en petit comité, ils allaient fêter les vingt ans de Thomas.

En passant devant une ruelle, des éclats de voix attirèrent son attention. Curieux, Thomas jeta un rapide coup d’œil pour voir un garçon brun aux prises avec un groupe de petites crapes qui l’avait encerclé. Étrangement, il ne les connaissait pas, ce qui était rare vu toutes les connaissances qu’il s’était fait dans le “milieu”. Ce n’était donc que des gosses qui voulaient jouer dans la cours des grands. Les idiots.

L’un d’entre eux menaçait le garçon avec un couteau, et bien qu’ayant l’air terrifié le brun gardait une posture digne et droite de parfait petit prince. C’était précisément le genre que Thomas détestait, les gosses de riches qui pètent plus haut que leur cul.

Le petit prince leva le regard vers Thomas, et ce dernier fut incapable de savoir s’il l’avait remarqué ou non. Il recula rapidement pour se cacher dans l’ombre.

Tremblant, le brun finit par donner son porte-monnaie (en cuir) à ses agresseurs. Des gamins stupides, ils agissaient à visage découvert… Petite bande de quartier.

Il aurait suffit que Thomas s’approche pour que les gosses lui obéissent au doigt et à l’œil. Il savait comment s’y prendre, il savait quoi dire. Et le gosse de riche aurait alors pu fuir avec le peu d’honneur qui lui restait.

Mais Thomas n’en avait rien à foutre. Il ne le connaissait même pas. Alors il traça son chemin sans le moindre remord.


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- X -

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Cinq heures du matin. Il était cinq heures du matin, et pourtant le salon de leur grande maison était encore allumé. Cela ne pouvait signifier qu’une seule chose : ses parents étaient encore debout à l’attendre. Ça n’allait pas être une partie de plaisir…

Il traversa rapidement le jardin de la propriété, sauta par dessus les trois escaliers du porche, et ouvrit la porte d’entrée qui n’était pas fermée à clef, sa main encore un peu tremblante de la peur qu’il avait eu plus tôt dans la nuit.

Soupirant, William jeta ses clefs sur le buffet du salon où ses parents l’attendaient. Comme si ça n’était pas suffisant de se faire agresser en pleine rue d’une ville censée être sûre, il devait affronter son géniteur…

Son père avait les mêmes yeux et cheveux noirs que son fils, la même peau mate, et pratiquement la même taille. Sévère, l’homme ne lâchait pas son fils du regard pendant que sa mère lui adressait un sourire compatissant.

« Où étais-tu ce soir ? commença monsieur Lecomte.

— À Aix, répondit William en toute franchise.

— À Aix, à boire de l’alcool et draguer des filles… »

William sourit à cette idée.

« Non, j’ai juste vu un vieil ami. »

Son père hocha la tête, perdu dans ses pensées.

« Et mardi ? J’ai entendu dire que tu n’avais pas cours cet après-midi là… »

William hésita un long moment, incapable de parler.

« J’ai… été voir des amis… »

Il était pitoyable pour mentir, voilà pourquoi il préférait les mensonges par omission… Son père, peu convaincu, approcha de la table basse du salon et y jeta un petit morceau de papier plastifié. Le cœur de William se serra en reconnaissant le double de sa fausse carte d’identité, qu’il utilisait pour les courses de moto. Apparemment, son père n’avait pas encore trouvé son faux permis moto…

« C’est marrant, j’ignorais jusqu’ici que tu étais né en 1985. Et j’ignorais aussi que tu te nommais Bill Jones. On a beau vivre dix-sept ans avec une personne, il est toujours surprenant de voir tout ce qu’on a encore à apprendre à son sujet…

— Papa…

— Tu étais avec ton oncle à Lédenon. »

Le brun tripota nerveusement ses doigts.

Son père se redressa pour arpenter silencieusement la pièce.

« Tu sais, on t’a toujours laissé libre de tes actes dans la mesure où tu ne nous cacherais rien. Mais tu trouves encore le moyen d’aller traîner avec Dieu sait qui ; et tu oses rejoindre ton oncle sur les circuits alors que tu sais à quel point cela est dangereux et que nous ne voulons pas que tu le fasses ; tu as des faux papiers qui te vieillissent de trois ans.

« Et tes amis que nous ne connaissons même pas… Sont-ils si peu fréquentables ?

— Non ! protesta vivement William.

— Ta mère et moi en sommes venus à une décision. Prends ça comme une expérience pour te rendre compte de la chance que tu as d’être avec nous ici, où tu ne manques de rien. Puisque tu t’intéresses tellement à la vie de… prolétaire, tu vas aller vivre chez ton si cher oncle pendant un temps indéterminé. Tu vivras dans sa maison, tu iras dans un lycée public. Et avec tout ça, tu verras à quel point tu es chanceux de nous avoir. Je sais que tu reviendras à la maison en ayant oublié tes fantaisies stupides d’adolescent. »

Eh bien ça promettait…

Et en plus de tout ça, il s’était fait voler tout son argent…


(à suivre dans le chapitre 03…)

Par Kalsang - Publié dans : Le Prince et le Pauvre
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